Short Design Fiction — Épisode #5

Série “Histoires courtes où l’humain a merdé”

Meven
4 min readMar 21, 2019
© Photomontage : Meven Royo

…et voilà ce qui explique pourquoi l’ADN ne peut se répliquer correctement après avoir été infecté par un virus.” conclu le professeur Deroy, accompagné de la sonnerie signalant la fin de son cours. Les élèves se mettent à sortir un à un de la classe. Tandis que certains sont déjà en train de se désaltérer, d’autres se faufilent rapidement pour aller au prochain cours en longeant les murs rouge et blanc de la salle.

Le rouge. Une couleur omniprésente au sein de l’établissement. Les chaises sont rouges, les tables bien que blanches, possèdent des pieds rouges. Tout, au sein de l’école, alterne entre rouge et blanc avec — notons-le — de légères pointes de noir et vert. Mais c’est bien le rouge qui a la part la plus belle. Si cette couleur traditionnellement associée au sang peut effrayer, ici, le design des fournitures, des meubles, ou encore la décoration des murs… tout est mis en scène pour sublimer cette couleur sans jamais qu’elle n’agresse. Ce qui agresse dans ce lycée ce serait plutôt la quantité de distributeurs et d’écrans télévisés diffusant à longueur de temps des spots glorifiant les moments de partage entre amis.

Sarah et Paul sont des élèves de cette classe de terminale qui vient tout juste de finir son cours de biologie. L’an prochain, ils veulent intégrer une université prestigieuse. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils se sont inscrits dans ce lycée en particulier. Réussir ici, c’est s’assurer de grandes chances de finir là-bas. Même s’ils savent que certaines personnes “chez” Google on pu aller dans l’université tant convoitée. Les cours ne sont pas si durs. C’est surtout la quantité de sport pour ne pas grossir qui est compliquée à gérer . Car c’est bien l’un des problèmes majeurs dans le lycée : la surconsommation de soda nécessite une grande quantité d’activités sportives. Le lycée déploie en revanche d’énormes moyens financiers pour proposer une multitude de clubs et activités en tout genre. Cela permet in fine de boire à longueur de temps des sodas sans trop grossir. Après tout, être “bien foutu” ce n’est qu’une question de sport et de volonté. “On peut manger tout ce que l’on veut, du moment qu’on élimine”. Une devise bien intégrée par les lycéens.

Cet établissement dont nous parlons c’est le Coca-Cola Saint-Exupéry High School. Notons que le terme lycée est tombé en désuétude car pas assez “mainstream. Ici, les sodas sont gratuits et illimités. Coca-Cola règne en maître sur l’industrie de la boisson depuis bientôt cinq ans grâce à la pénurie mondiale d’eau potable (dont il est en partie responsable). Des boissons Starbucks à l’Ice Tea en passant par le Coca… quatre-vingt pour cent de la population mondiale boit quotidiennement des produits de la firme. Mais ce n’était pas assez. Un jour, l’entreprise eu une idée de génie. Pour s’assurer que les jeunes générations continuent de consommer ses produits (et aussi pour garder son image de bienfaiteur), la marque décida de se lancer dans l’éducation. En France, le timing était parfait puisque le système public avait échoué suite aux incessantes coupes (et recoupes) budgétaires de l’Éducation Nationale. Alors quand l’entreprise internationale est arrivée avec des milliards d’euros sur la table : l’État était ravi.

L’université que visent Paul et Sarah n’est autre que The Coca-Cola University of Harvard, rachetée il y a de ça quelques années. Coca-cola a été l’un des premiers à racheter les universités de renom faisant de lui l’un des leaders de l’éducation. La nouvelle “Ivy League” est désormais composée, entre autres, de Google University of Yale et Amazon Brown University. Que font les étudiants après leurs études ? Ils travaillent pour ces géants. De toute façon, depuis qu’ils sont en primaire, leurs cours s’articulent autour des problématiques de ces géants, qui emploient plus de la moitié des êtres humains sur Terre.

Short Design Fiction — “Histoires courtes où l’humain a merdé.”
une série pour questionner nos comportements et les dérives possibles que cela pourrait engendrer. Semaine prochaine : “Inspiration”.

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